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Bourbon Strip

12 juillet 2011

Je viens de terminer le 1er volume de

Je viens de terminer le 1er volume de l'anthologie d'American Splendor. Je connaissais la bande-dessinée « de nom » et deux ou trois petits détails à son sujet (c'est la force, et surtout la faiblesse, des gens qui lisent plus sur les choses, qu'ils ne lisent les choses elles-mêmes : ils sont rarement pris au dépourvu, mais peuvent difficilement approfondir) : un truc autobiographique de longue haleine que je classais, par commodité, dans la catégorie « bande dessinée à la Spiegelman », dont on avait tiré un film, il y a quelques années.

Première découverte en parcourant le 4ème de couverture : Crumb a participé à l'aventure. L'excitation me gagne ! J'apprécie le travail du bonhomme et son amour forcené des vieux albums de jazz (un ami m'a prêté, il y a moulte, sa sélection The Stuff That Dream Are Made Of qu'avec plaisir je ressors régulièrement du carton numérique où elle sommeille, afin d'éviter qu'elle ne prenne trop la poussière), amour communicatif qui m'a permis de découvrir l'incroyable Charlie Patton. Bref, je pousse plus avant mon exploration de l'objet et apprends qu'American Splendor est l'oeuvre d'Harvey Pekar, le scénariste, dont les histoires sont illustrées par différents artistes, au nombre desquels le fameux Crumb. Phénomène plutôt rare dans le monde de la bande-dessinée underground. Je me dis qu'il faudra creuser tout ça par la suite, entame la lecture et là, c'est le choc …

De quoi parle American Splendor ? Uniquement, constamment et magistralement d'Harvey Pekar. Un fils d'immigrés juifs polonais, cultivé dans de nombreux domaines, qui travaille comme employé de bureau à Cleveland. Il publie des articles dans des revues à la diffusion confidentielle, se marie, divorce, se remarie, angoisse et porte sur lui-même et le monde qui l'entoure un regard souvent désabusé. Une passion dévorante pour le jazz lui fait croiser la route de Robert Crumb, avec qui il va lier une amitié indéfectible. Pekar aimerait créer sa propre bande-dessinée, mais il ne sait pas dessiner. Crumb le pousse à se lancer. Pekar lui présente une histoire (très) sommairement mise en page. Emballé, le dessinateur propose de participer à l'illustration. En 1975, sort le 1er numéro d'American Splendor. Tout en continuant de travailler au service des dossiers du Cleveland's Veteran's Administration Hospital, Pekar publiera un nouveau numéro chaque année, jusqu'à sa mort en 2010.

«  Am I a guy who writes about himself in a comic book ? Or am I just a character in that book ? If I die, will that character keep going ? Or will he just fade away ? ». La citation, tirée du film American Splendor de Shari Springer Berman et Robert Pulcini(je n'ai pas encore eu le temps de vérifier si elle apparaissait dans l'album Our Cancer Year où elle devrait figurer, ce que je suppose), résume parfaitement l'une des problématiques centrales de l'oeuvre : la quête d'identité.

En choisissant de se mettre en scène, ainsi que tous ses proches, Pekar courait le risque de tomber dans la chronique pathétique et/ou cynique du quotidien. Par son sens de la narration et le travail des dessinateurs qui lui ont donné corps, il s'élève au dessus de tout cela et touche à l'universel (le propre de toute oeuvre qui dure). Ce qui lui arrive l'affecte, l'emmerde, le motive (ou pas ... souvent pas) et nous parle. Pekar, c'est nous. Dès lors, de personne, il devient personnage.

 

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